Quand j’ai commencé ma généalogie, ma mère m’a tout de suite dit que son arrière-grand-mère, épouse de Charles PELLETIER, s’appelait Coralie KRABBE de GARICIUS et qu’elle était danoise. Ma tante qui avait commencé, avant moi, à chercher nos ancêtres m’a confirmé cette information mais n’avait que sa date de décès à m’indiquer…
Débutante, je me suis tout de suite dit que les recherches ne seraient pas faciles sur cette branche de mon ascendance…
Si je savais peu de choses sur Coralie, j’avais par contre la chance d’avoir un superbe portrait, gravé, signé FD pour Ferdinand DELANNOY dont j’apprendrai plus tard que c’est un grand ami de ses parents.

J’ai donc commencé mon enquête et découvert les difficultés des recherches dans l’état civil parisien, du fait de l’incendie de l’Hôtel de Ville en 1871. Mais par chance, je n’ai pas eu de mal à retrouver, en me déplaçant aux Archives de Paris, puisque c’était bien avant qu’elles soient en ligne, la date et le lieu de leur mariage dans les registres de la Collection Mayet. Le mariage religieux a eu lieu a Saint-Sulpice, le 18 juillet 1850.

Et j’ai pu après retrouver son acte de naissance en parcourant, avec bien des difficultés techniques, les microfilms de l’État civil reconstitué. Elle est née le 15 novembre 1830, 47 rue de la Montagne Sainte-Geneviève, dans le 5e arrondissement. Je découvre qu’elle est la fille de Pierre Henri KRABBE, éditeur et de Jeanne Angélique VIALAT. Nulle mention de GARICIUS. Et sur son contrat de mariage, trouvé depuis, Coralie signe seulement KRABBE.

J’ai eu beaucoup de chance car j’ai pu remonter facilement son ascendance KRABBE. De père en grand-père, je suis remontée à Antoine Henry KRABBE, marié à Adélaïde Sophie ROUVEAU. Je me suis dit que peut-être, ils avaient laissé tomber la particule après la Révolution mais non, je suis remontée à Jean Théodore Bernard KRABBE qui vivait sous Louis XV et toujours pas de KRABBE de GARICIUS. J’ai découvert que celui-ci avait été naturalisé, étant originaire de Coesfeld en Allemagne.
Parallèlement, pendant plusieurs années, j’ai fait régulièrement, sur internet, des recherches avec « KRABBE de GARICIUS » ou « GARICIUS ». Et cela ne me donnait rien. Par contre, j’ai vu sur Geneanet que c’est au Danemark qu’il semblait y avoir le plus de porteurs du patronyme KRABBE. Donc à défaut d’être native du Danemark, peut-être au moins avait-elle et donc avons-nous, des ancêtres originaires de ce pays ? Peut-être qu’en remontant l’ascendance allemande j’y arriverai…
Et puis un jour, surprise ! ! Ravie, je vois enfin apparaître, sur Gallica, M. de KRABBE de CARICIUS et… il est danois !!

Ça y est j’allais pouvoir confirmer à ma mère et ma tante qu’elles avaient bien raison ! Mais très vite, en recherchant des infos sur ce personnage je me suis rendu compte que ce n’était pas possible. D’après cette généalogie, trouvée sur internet, le père de Hans KRABBE de CARICIUS s’appelait KRABBE, c’est sa mère qui s’appelait CARICIUS ou CHARISIUS. Sans doute à sa nomination comme Ministre d’Etat et des Affaires étrangères, cela faisait mieux d’ajouter le nom de celle-ci à son patronyme et de mettre une particule devant.

Comme j’étais remontée plus haut que ce Hans KRABBE-CARICIUS sur l’ascendance de Coralie, ce n’était pas possible que nous descendions de ses parents.
Tout cela demeurait intriguant mais en réfléchissant, je pense avoir trouvé l’origine de cette légende. Comme on le devine sur la gravure, Coralie est une grande lectrice, ce que m’a confirmé ma mère, disant d’elle que c’était une intellectuelle. Cela n’est pas étonnant puisque son père était libraire-éditeur. D’ailleurs j’ai retrouvé un brevet de libraire, demandé par son mari, Charles PELLETIER et accordé le 19 juin 1852. C’était surprenant puisqu’à cette époque, il était déjà conducteur des Ponts et Chaussées. Dans l’enquête de police, contenue dans le dossier d’attribution du brevet, les institutions se demandant si cela n’était pas un prête-nom pour son beau-père, il est noté : « Le postulant a une certaine instruction mais il est encore sans aptitude, c’est sa femme qui le guide. » Charles a revendu le brevet, le 18 mai 1855.
Et en reprenant la source, trouvée sur Gallica, sur laquelle figurait ce Hans de KRABBE-CARISIUS, je me suis rendue compte que ce livre avait été publié, à Paris, en 1837.

Donc j’imagine que Coralie a pu lire ce livre qui devait se trouver dans la librairie de son père et que tombant sur cette page, elle s’est mise à rêver son ascendance, à y rêver tant qu’elle a réussi à s’en persuader si fort qu’elle l’a racontée à son petit-fils qui l’a racontée à ses enfants et c’est ainsi que naissent les légendes…
Ce qui m’étonne c’est que Pierre Henri KRABBE devait sûrement connaître son ascendance, au moins jusqu’à son grand-père, venu d’Allemagne. Alors a-t-il laissé rêver sa fille ou bien Coralie s’est-elle inventé son ascendance sans lui en parler ?
Personnellement j’étais ravie d’avoir, du moins je pense, résolu cette énigme mais j’ai bien senti un peu de déception, voire d’incrédulité chez ma mère et ma tante quand je leur ai fait part de ma découverte et je ne suis pas sûre d’avoir convaincu mon oncle à qui j’en ai parlé à la fin de sa vie. Mais elles se sont vite consolées quand je leur ai parlé des vraies vies au moins aussi intéressantes qui se cachaient derrière notre ascendance KRABBE. Mais ce sont d’autres histoires…
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