Avant de clore ce Challenge AZ, j’ai compté toutes les rues, citées dans les actes, BMS ou notariés, concernant mes 353 parisiens dont 88 ancêtres. Bien que pour beaucoup, je n’ai que la paroisse ou l’arrondissement, j’ai recensé 244 rues dans lesquelles, il s’est passé au moins un évènement. J’ai été surprise d’en avoir autant. Et il faudrait que je reprenne, les nombreux actes notariés parisiens que j’ai photographiés ou trouvés en ligne, depuis le début de mes recherches. En effet, je ne notais pas forcément les adresses de tous les collatéraux ou bien les mettais en notes des témoins et celles-là n’apparaissent pas dans la liste des lieux. Après avoir fait ce comptage, j’ai voulu les répartir par arrondissement.

Elle met bien en évidence l’évolution du développement de Paris, à partir de son centre historique. Il y a 10 rues, non prises en compte sur la carte, n’ayant pu les classer, car étant sur deux arrondissements. De plus, dans les 19e et 20e, j’ai au moins 7 ancêtres et 16 collatéraux et encore pas mal d’autres à saisir qui ont habité à Belleville, annexée à Paris en 1860. Mais pour eux, je n’ai bien sûr aucune rue, tout au plus l’indication d’un hameau. Si j’ai 244 rues pour 353 individus, il y en beaucoup pour lesquels je n’en ai pas contrairement à d’autres qui en ont plusieurs. Mon champion incontesté en ce domaine est Pierre Henri KRABBE pour lequel j’ai 10 rues mais c’est aussi du fait de la facilité de le suivre avec les adresses d’édition de ses livres !
Beaucoup de rues mais peu de maisons localisées

Ce qui est bien sûr plus difficile, avant la numérotation des rues, c’est de savoir à quel endroit de la rue, ils habitaient. Mais parfois le notaire a pensé à nous, en indiquant que la maison se trouvait en face de telle rue ou de tel édifice, comme cette maison achetée par Dominique BARRAU et son épouse, rue Saint-Honoré, qui se situe vis à vis des Quinze-vingt. D’autres fois il est précisé que c’est la maison où pend telle enseigne, comme celle « À la Rose », rue de la Licorne, ou « Au Marc d’or », rue de Gesvres mais je n’ai pas réussi à les localiser.
Mes ancêtres étaient-ils propriétaires ou locataires ?
Ce n’est pas toujours facile de le savoir en l’absence de bail ou d’acte d’achat mais cet article m’a apporté la réponse. « Les échanges locatifs constituent à bien des égards le seul marché immobilier parisien à proprement parler. Non seulement pour ce qui regarde la quantité de transactions : l’inégalité d’accès à la propriété est telle que les locataires constituent l’écrasante majorité des citadins. Le bail est la règle, la vente l’exception. Mais surtout, cette relation est qualitative car les loyers servent d’assise aux valeurs en capital des immeubles dont l’évaluation repose essentiellement sur eux. » (1)
L’appellation maisons correspond plus à notre notion d’immeubles. Elles ont plusieurs étage, au moins trois ou quatre avec le dernier lambrissé, voire plus, et assez souvent, comme on l’a vu pour plusieurs de mes ancêtres, sont composées de deux, ou même trois ou quatre corps de logis, avec une cour au milieu. Elles sont souvent juridiquement éclatées entre plusieurs copropriétaires, lors des partages, aucun des cohéritiers ne pouvant se les voir attribuées. Nombre de mes ancêtres sont propriétaires de tantièmes de maisons qui restent en indivis et dont ils touchent des tantièmes de revenu. L’accession à la propriété était d’autant plus difficile qu’on ne vend pas d’appartements isolés avant le début du XXe siècle. La mise de départ pour acheter est donc élevée. Seuls les plus riches sont significativement propriétaires et souvent ils sont multi-propriétaires, l’achat d’une maison générait des revenus intéressants permettant d’en racheter une autre… C’est le cas pour deux de mes ancêtres, Dominique BARRAU et son épouse qui ont acheté deux maisons, la grande de la rue de l’Arbre-Sec et celle, rue Saint-Honoré, en face des Quinze-vingt, plus un fief à Clamart et Edmé Laurent BOUTRON et sa femme qui en ont acquis trois, une rue Froidmanteau, une rue de la Harpe et la troisième rue du Coq Saint-Honoré. Mais ce sont des maisons plutôt en mauvais état, certaines achetées par adjudication, et pour lesquelles des travaux sont nécessaires, voire qu’il faut démolir et reconstruire. Et je retrouve des dettes à payer dans les successions…

J’ai plusieurs fois trouvé la mention de « locataire principal » et voici l’explication. « Le principe est le suivant : le riche propriétaire d’un immeuble désire le mettre en location, mais ses relations sociales ne le placent pas au contact de populations potentiellement intéressées par les chambres ou les étages à louer. Ce propriétaire laisse donc un artisan ou un marchand qui tient souvent boutique au rez-de-chaussée, prendre à bail tout l’immeuble, avec pour mission de faire agir ses réseaux, trouver des locataires pour le remplir, et s’assurer que chacun paye son dû en temps et en heure ! À mesure que le pouvoir royal entreprend de taxer les revenus immobiliers, d’ailleurs, les propriétaires tendent de plus à se décharger de cette taxation sur le « principal locataire », qui prélève les sommes correspondantes sur les sous-locataires. » (2)
Et en conclusion, je n’imaginais pas, quand je me suis lancée dans ce Challenge AZ, que j’allais découvrir, de fil en aiguille, autant d’informations sur mes parisiens et leur cadre de vie . Ça valait le coup !
Sources
1 – L’immobilier parisien au XVIIIe siècle : un marché locatif, Nicolas Lyon-Caen, in Histoire urbaine
2 – Les Lumières en galère. Louer et sous-louer au 18ème siècle, Echos des lumières