Avant que ne se termine 2024 et que ne commence 2025, et n’ayant pas encore retrouvé mes Sosas 2024 et 2025, je vous emmène à une rencontre plus proche dans le temps, sur l’ascendance de mon grand-père maternel, en Gironde.
Dominique DUCOURNAU
Il naît le 20 février 1817 à Villenave-d’Ornon, fils de Bernard DUCOURNAU et de Jeanne TEYCHENEY.

Je lui ai trouvé deux sœurs, Catherine, née le 6 décembre 1814 et Marguerite qui voit le jour, le 31 juillet 1820.

La famille habite au hameau de Couhins où le père est cultivateur.

Marie DUPUCH
Elle vient au monde le 17 juin 1826 à Gradignan, fille de Pierre DUPUCH, laboureur et de Marie HAZERA. Elle est la dernière d’une adelphie de six enfants. Son frère Jean est né en 1613, Marie en 1615, Martin en 1617, Jeanne en 1819 et Jean en 1822.


La famille réside au petit hameau de Peycamin où il n’y a que trois maisons.
Leur mariage
Le 26 mai 1845, c’est la fête à Gradignan où a lieu le mariage de Dominique et Marie. Il a alors 28 ans et elle en a 19. Le père de Marie signe avec les deux époux mais le père de Dominique déclare ne pas savoir. Il n’apparaît pas qu’il y ait eu un contrat de mariage qui m’aurait permis de mieux les connaître. Et les témoins ne sont pas des membres des deux familles.

Gradignan, une cité viticole
C’est aux anglais à partir du XIIIe siècle qu’elle doit l’extension de son vignoble. Après leur départ, au XVe siècle, ce fut l’arrêt brutal. Quelques décennies plus tard, les vignes repartaient de plus belle. Le XVIIIe siècle marqua le début de la grande époque du vignoble. Le phénomène s’explique par la vitalité du commerce bordelais avec les colonies, les petites Antilles, Cayenne et l’île Bourbon (actuelle île de la Réunion). Beaucoup de négociants se rendirent maîtres de propriétés viticoles afin d’envoyer du vin aux colonies. Le trafic concernait en retour l’achat de sucre, de café, de cacao et de rhum.
A côté des gros propriétaires, il existait une foule de petits vignerons, de loin les plus nombreux. Si l’on tient compte des professions liées à la viticulture (tonneliers par exemple) on peut dire que les trois quart de la population de l’époque vivaient d’activités viticoles. En 1882, les vignes couvraient encore 45 % du territoire.
Dominique est tonnelier…
Sur son acte de mariage, sur les actes de naissances de ses enfants et sur l’acte de mariage de sa fille en 1869, il est dit tonnelier.

Bibliothèque nationale et universitaire de Strasbourg
Les fabrications des tonneliers étaient nombreuses : baquets, bailles, baignoires, barattes, barils, barillets, cuveaux, seaux, seillons, hottes et bien sûr tonneaux. Le tonnelier de village était pratiquement le seul à fabriquer des tonneaux ou à réparer les vieux fûts des vignerons.
Un fût représente un prodige technique. Selon le savoir-faire traditionnel, n’entrent dans sa composition aucune colle ni aucun clou et que son étanchéité résulte de la seule habileté de l’artisan qui fend le bois, taille les douelles (douves) et les assemble en force, puis les cintre par le feu et les cercle de bois souple ou de métal, parfois les deux, pour les maintenir assemblées. Le liquide que l’on y place fait le reste en gonflant le bois. Il est également facile à vider sans effort grâce au trou percé sur l’un des fonds et qui permet le soutirage par gravité. Le trou de bonde, quant à lui, percé sur le flanc bombé, permet le remplissage et l’ouillage* régulier.

Pour former un bon tonnelier, il fallait compter trois ans minimum. La période de l’année pendant laquelle le tonnelier faisait des barriques, appelée « campagne » commençait au mois de mars et se terminait au mois de novembre. Le tonnelier travaillait à la tâche, c’est-à-dire, à la pièce et gagnait peu. Il travaillait dix à douze heures par jour. En 1874, le Bordelais comptait plus de 60 employeurs, 2000 ouvriers tonneliers et des centaines d’artisans. Beaucoup de châteaux avaient leurs tonneliers. On était tonnelier de père en fils et le tonnelier souvent devenait maître de chai. Je ne sais par qui Dominique a été formé, car son père était cultivateur. Mais il semble qu’il ait bien réussi.
… puis négociant en vins
En effet, si sur son acte de décès, il est toujours dit tonnelier, sur les actes de mariage de ses enfants qui ont eu lieu en 1879, 1880 et 1888, il est propriétaire, négociant en vins. Je n’ai pas trouvé son inventaire après décès qui m’aurait permis de savoir s’il possédait des vignes mais le partage de la succession de son fils aîné, François, mon arrière grand-père, en 1921, me permet de le penser. En effet, il est écrit que ce dernier avait acquis par adjudication, en 1904, un ensemble de propriétés, dont des bâtiments d’habitation mais également des vignes et un chai au hameau de Peycamin et aussi au lieu-dit de Hourès que je n’ai pas pu situer. Si je comprends bien, ces propriétés avaient appartenu à ses parents. Malheureusement, je n’ai pas trouvé, sur le site des Archives départementales, le notaire COSTE, à Bordeaux, ayant dressé le procès verbal.

Leurs vies de parents
Ils ont eu cinq enfants, trois garçons et deux filles qui sont tous nés au hameau de Peycamin. Mais ils ont manqué d’originalité pour prénommer les garçons qui s’appellent tous François.
L’aîné est mon arrière-grand-père, François qui voit le jour le 2 avril 1846 et dont j’ai déjà parlé ici. Ma mère m’a raconté qu’il était parti vers 16 ans au Pérou, rejoindre son oncle DUPUCH. Je n’ai pas retrouvé trace de son passeport mais il y est bien allé.
Le 6 avril 1848, c’est la naissance de Marguerite. Elle se mariera le 3 novembre 1869 avec Antoine BAUX, menuisier, fils de François BAUX, menuisier et de Catherine LAFEYCHINE. Les époux ont 27 et 23 ans. Ils auront trois enfants avant le décès de Marguerite, le 8 juin 1878. Elle a tout juste 30 ans.
Le second François naît le 22 juin 1856. C’est probablement lui, âgé de tout juste 18 ans, avec sa moustache naissante, ses cheveux bruns et ses yeux marrons, dont j’ai retrouvé le passeport pour l’Angleterre, le 27 juillet 1874.

Puis vient au monde Marie, le 22 juillet 1858. Elle se marie le 4 août 1880 avec son beau-frère, Antoine BAUX, devenu veuf. Mais Dominique et Marie ne sont ni présents ni consentants. Est-ce parce qu’ils n’appréciaient pas leur gendre ou parce qu’ils trouvaient que la différence d’âge était trop importante, il avait 38 ans et elle tout juste 22 ? Les futurs étaient sous la loi du 1er Germinal An XII pour laquelle la majorité matrimoniale était de 25 ans pour les garçons et 21 ans pour les filles. Mais si, en ayant la majorité matrimoniale, il était possible de se marier sans autorisation parentale, les futurs époux n’en sont pas moins tenus, par la loi, de demander le conseil de leurs parents ou de leurs grands-parents, ou, à défaut, de leur notifier leur projet de mariage par des actes respectueux. Antoine et Marie ont donc remis les actes respectueux, en dates des premier mai, deux juin et trois juillet, notifiés au père et à la mère de la future par Maître BALLAU, notaire à Gradignan et le décret du Président de la République en date du 8 juin dernier accordant dispense d’alliance aux futurs époux.

Ils avaient, au préalable, réglé les conventions civiles de leur mariage par un contrat, passé devant le même notaire, le 31 juillet. Je n’ai malheureusement pas ce contrat avec lequel les parents n’étaient sans doute pas d’accord et je ne trouve pas de notaire portant ce nom sur le site des Archives Départementales. Je leur connais un fils, Léon, né 10 mois après le mariage.
Le troisième fils voit le jour, le 14 septembre 1863. Sur son acte de naissance, il se prénomme uniquement François mais sur son acte de mariage, et sur l’acte de naissance de sa fille, il est prénommé François Emile et la date de naissance qui est donnée est bien celle-ci. Il se marie, le 24 novembre 1888 avec Alice BIRAC, fille de François, confiseur à Bordeaux et de Marguerite DETRETEAUX. François habite également à Bordeaux, 57 rue du Pas Saint-Georges et est employé de commerce. Plus tard, il sera voyageur de commerce. Ils ont la bougeotte, ces trois François.
À l’heure de la retraite
Sur le recensement de 1891, Dominique et Marie demeurent toujours au hameau de Peycamin. Vivent aussi avec eux, leur second fils François, âgé de 34 ans qui est négociant ainsi que leur domestique, Jeanne DUBOS, âgée de 19 ans. En 1896, François n’est plus avec eux mais je ne sais pas s’il s’est marié car j’ai perdu sa trace. Leur bonne s’appelle Marie RISPAIL et a 15 ans. Au recensement de 1901, il en est de même. C’est l’année suivante que Dominique s’éteint, le 14 août 1902, quittant Marie après leurs cinquante sept ans de vie commune. Je ne suis pas sûre d’avoir beaucoup d’autres couples de mon arbre qui aient eu ensemble une telle longévité.

Marie poursuit sa vie encore quelques années, toujours dans leur cher Peycamin dont elle a peut-être bien hérité pour partie de ses parents car elle ne l’a pas quitté, de sa naissance à son décès, le 2 octobre 1907, âgée de 81 ans. Je n’ai hélas pas de photo de ce lieu, ni de cette région où j’ai encore tout à découvrir.
Sources
* L’ouillage consiste à ajouter régulièrement un vin de qualité égale dans les fûts par le trou de bonde pour palier à la perte d’une partie du vin, soit par l’action de l’évaporation, soit par l’infiltration dans le bois. Ce gain d’espace laisse logiquement plus de place à la possibilité d’une oxygénation du vin qui peut le faire tourner en vinaigre.