Au fil du temps
Le Pont Saint-Michel, situé dans le 5e arrondissement, relie la place Saint-Michel au boulevard du Palais, sur l’île de la Cité. Ce pont a été construit en pierre en 1378. Terminé en 1387, on l’appela Petit Pont, Petit Pont Neuf, Pont Neuf. Mal construit, il fut emporté par les glaces, le 31 janvier 1408, avec les maisons qu’il portait. Reconstruit en 1416, il reçut en 1426, le nom Saint-Michel dû au voisinage de l’ancienne chapelle Saint-Michel-du-Palais qui existait dans le Palais royal. Heurté par un bateau, il s’effondra le neuf décembre 1547 avec ses dix-sept maisons. Reconstruit en 1549, en bois, emporté par une inondation le 30 janvier 1616, il fut aussitôt rebâti en pierre et porta de chaque côté trente deux maisons qui ne furent démolie qu’en 1786 et 1809. Ce pont a été reconstruit pour la quatrième fois, par Vaudrey, en 1857.

La première pierre du fondement du Quai Saint-Michel fut posée le 4 août 1561 mais ça n’a pas été plus loin. En effet un arrêt du Conseil du Roi, en date du 25 avril 1767, et des lettres patentes en date du 31 juillet 1767 ordonnèrent la construction de ce quai avec la destruction des maisons qui bordaient la Seine et l’érection d’un quai à la place de la berge. Les actes administratifs précédents n’ayant pas été suivi d’effet, un nouveau décret en date du 25 mars 1811 fut pris par Napoléon 1er. Les travaux commencent en 1812 et le quai fut ouvert à la circulation en 1816, sous le nom de quai Saint-Michel

Mes ancêtres qui y demeurèrent
Sur le Pont…
Nous sommes le 7 juillet 1777, rue des Prouvaires, paroisse Saint-Eustache, dans une maison dont le Sr DELANGE, ancien prieur est propriétaire et où est décédé le 20 juin dernier, à 57 ans, mon ancêtre, Jean Théodore Bernard KRABBE, veuf de Anne Sabine CERNEAU, décédée, à 37 ans, le 14 juillet 1763. L’inventaire a été fait à la requête de Pierre CERNEAU, maître orfèvre, cousin issu de germain, nommé subrogé tuteur des enfants, au décès de leur mère et leur tuteur aux causes et curateur aux actions immobilières, après qu’ils aient été émancipés d’âge par lettre de la Chancellerie, du 25 juin 1777.
Au décès de leur père, ces enfants sont encore bien jeunes et je suis étonnée qu’aucun ne demeure rue des Prouvaires. Sans doute que leur père était malade depuis un moment et que des solutions pour l’avenir des enfants avaient été anticipées. Pierre Henry, l’aîné, est âgé de 20 ans et il vit à Saint-Germain-en-Laye, chez le Sieur OLIVIER, maître … (je n’ai pas réussi à déchiffrer son métier), chez qui il est peut-être en apprentissage mais j’en doute car il sera plus tard maître chandelier et cela ne ressemble pas du tout à ce qui est écrit. Anne Marie, âgée de 19 ans et Pierre Théodore, âgé de 16 ans, demeurent tous les deux, chez Pierre CERNEAU, sur le Pont Saint-Michel, paroisse Saint-Barthélémy. Le 24 février 1778, Anne Marie épousera Jean Louis GOBERT, doreur, en l’église Saint-Barthélémy. Pierre CERNEAU y décède, le 14 décembre 1783.

Je pensais que les maisons sur les ponts étaient construites en bois pour être plus légères et bien c’est tout le contraire comme je l’ai découvert, dans une vidéo passionnante de Youri Carbonnier sur les maisons parisiennes au 18e siècle et entre autres celles sur les ponts. Les maisons construites en pierre consolident en fait les ponts, en les alourdissant, cela les stabilise. Ce sont des maisons petites au sol, ayant en moyenne deux toises de large sur quatre de profondeur (environ 4 m x 8 m) mais elle sont sur plusieurs étages. Ces maisons présentent une uniformité car elles ont été construites en même temps, un peu comme un lotissement. Sur le pont Saint-Michel, elles sont regroupées par deux avec une haute toiture en ardoise. Au niveau du pont, il y a une boutique et arrière boutique mais leur inconvénient c’est qu’il n’y a pas de cave, ce qui empêche, par exemple, des commerces de bouche de s’y installer. Les murs sont en pierre, par contre ce qui est en pans de bois, ce sont les cloisons intérieures ainsi que les saillies en encorbellement, sur plusieurs niveaux, au dessus-de la Seine qui permettent d’agrandir un peu les surfaces. Et puis c’est bien pratique, à leur premier niveau, se trouve le cabinet d’aisance. C’est présenter comme un avantage car pas besoin de faire vider les fosses d’aisance ! Certes mais quand par ailleurs, l’autre atout avancé pour ces maisons, lorsqu’elles ont été expropriées, c’est qu’il suffisait de remonter l’eau de la Seine avec une corde…
Il reste un dernier enfant de Jean Théodore Bernard KRABBE dont je n’ai pas encore.parlé. C’est le plus jeune, mon ancêtre, Antoine Henry, âgé de 15 ans qui habite chez Nicolas VALLERY, maître horloger, également sur le Pont Saint-Michel, Paroisse Saint André des Arts où il a été mis en apprentissage, par son père, du 1er avril 1777 au 1er avril 1780, selon contrat passé sous seing privé, en date du 14 avril 1777. C’était bien peu de temps avant sa mort qu’il pressentait sans doute advenir. J’ai vu dans d’autres actes que Nicolas VALLERY était un ami de la famille, Antoine Henry a sûrement été bien accompagné. Et il n’était pas loin de son frère et de sa sœur, mais ils ne sont pas du même côté du pont. Celui-ci est divisé en deux, comme on peut le voir sur ce plan. La moitié du côté de l’île de la Cité, dépend de la paroisse Saint-Barthélémy, c’est là qu’habite Pierre CERNEAU et l’autre côté, dépend de la paroisse Saint-André-des-Arts, où est dit demeurer Nicolas VALLERY.

Mais laissons Antoine Henry faire son apprentissage avec Nicolas VALLERY qui l’a bien formé puisqu’il deviendra maître horloger en 1787. Malheureusement, je n’ai pas, pour l’instant, réussi à accéder à l’acte qui le prouve.
En remontant le temps, nous voici le 19 janvier 1625, la noce se prépare chez Pierre HOULLIET, maître fourbisseur et garnisseur d’épées que nous avons rencontré rue de la Huchette. Il marie sa fille Reyne à Jehan LAGUETTE, fils de défunt Nicolas et de Jeanne LENORMAND, et aujourd’hui toute la famille est rassemblée pour leur contrat de mariage. Le futur est maître cordonnier, et demeure sur le Pont Saint-Michel, paroisse Saint-André-des-Arts. Hélas l’épouse de Pierre, Michelle BONAMY, trop tôt disparue et Nicolas LAGUETTE, le père de Jehan, ne seront pas là pour partager la joie de leurs enfants. Le père et le futur signent mais il n’y a pas la signature de sa mère ni celle de Reyne.

Pourtant celle-ci a sûrement dû apprendre à écrire, car le 17 avril 1618, à son mariage avec Sébastien NOBLET, sa sœur Marguerite signe, même si son écriture est encore hésitante, ainsi que leur mère.


Sur le Quai…

Faisons un bond, pour arriver au milieu du XIXe siècle, mais pas bien loin, au 15 quai Saint-Michel. Nous retrouvons, un couple déjà rencontré dans ce Challenge AZ, Pierre Henri KRABBE, fils d’Antoine Henry et de Adélaïde Sophie ROUVEAU et époux de Jeanne Angélique VIALAT. Ce sont mes ancêtres qui ont le plus la bougeotte. Les livres que Pierre Henri édite me permettent de le suivre au fil de ses pérégrinations parisiennes. Les voilà donc arrivés à cette adresse où il publie en décembre 1840, Considérations générales sur la régence d’Alger de Emmanuel Poulle, député.
Le 20 août 1841, naît dans cette maison, leur petite Marthe Henriette qui est baptisée, le 25 août, à Notre-Dame, comme l’avait été son père. Hélas, elle a une vie éphémère car elle y décède le 29 août 1842.
Je ne sais pas quand la famille quitte le quai Saint-Michel mais le 19 mars 1847, à la naissance de leur dernière fille, Rosine Fernande Henriette, ils habitent au 39 rue Dauphine, dans le 6e arrondissement.
Sources
Jacques HILLAIRET, « Dictionnaire historique des rues de Paris, tome 2 »
Quand les ponts de Paris étaient couverts des maisons, « La voix des lieux », une autre vidéo très intéressante avec beaucoup d’illustrations.
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